Les interférences de la fujo-vision…

Je maintiens en dépit de mes détracteurs que Kagami est seme dans cette configuration !Dans le monde underground de la fanfiction, pléthores de couples à la mode sont issus des mangas de sport. Il n’y a que de bonnes raisons de lire du shônen de sport : les beaux-gosses, les beaux-gosses en sueur, les beaux-gosses en sueur qui se rentrent dedans sur le terrain, les beaux-gosses en sueur qui se rentrent dedans sur le terrain et remettent ça dans les vestiaires et j’en passe.

Un poster officiel ! Pas les graphismes de l'anime !

Autre argument vendeur, la large gamme de couplages possibles. Souvent, les équipes comptent plusieurs joueurs (une dizaine pour le football, à peu près pareil pour le baseball, cinq pour le basketball et un peu moins pour les sports de combat et le tennis) qu’il faut multiplier par le nombre d’équipes adverses que les héros devront affronter. Gardons le basketball – choix absolument partial et arbitraire – chaque équipe compte cinq joueurs plus les joueurs de réserves, laissant dès sa constitution des possibilités de couplage que l’on peut représenter comme suit :

(5 + 3 – 1)/2= 3,5

5 étant le nombre de joueurs titulaires

3 le nombre approximatif de joueurs de réserves

– 1 le personnage esthétiquement incompatible avec le yaoi

Ainsi, on peut affirmer que chaque équipe de basketball est potentiellement génératrice de 3,5 couples yaoi (le 0,5 représentant infailliblement un « crack-pairing ») et que ce chiffre connait une croissance exponentielle au contact des équipes adverses.

Une autre mine pour le Yaoi !Mathématiques foireuses à part, reconnaissons au shônen de sport sa propension à susciter admiration et terreur face à ses athlétiques figures voguant sur des terrains infinis, ses riches flashbacks dopés à l’émotion et aussi interminables que la série One Piece ainsi que ses dialogues percutants, pas du tout ambigus, pleins d’une saine rivalité et d’une franche camaraderie illustrant parfaitement le credo épique du Weekly Shônen Jump : Amitié, Effort, Victoire !

On peut s'y tromper, mais ce n'est pas une couverture de Yaoi...

Il arrive néanmoins, qu’au détour d’un chapitre, quelque situation incommodante surgisse. A l’instar d’une fenêtre pop-up se manifeste de manière totalement intempestive et incontrôlée la réalité augmentée de la fujo-vision. La fujoshi voit son cœur palpiter, ses joues tourner incarnat, sa respiration s’alourdir devant l’indécence du propos. A-t-elle bien lu ? Ses yeux parcourent la page à nouveau, emplis d’exaltation – que dis-je ? – d’exultation ! Visez plutôt :

Hayama : Okay… Let’s do this… Five fingers…

Izuki : What intensity… ! It’s completely different from everything up until just now. […] It’s the first time I’ve felt like this.

Que l’on peut traduire ainsi :

Hayama : Okay… On va le faire… Cinq doigts…

Izuki : Quelle intensité … ! Ça n’a rien à voir avec tout ce qu’il a pu faire jusqu’à maintenant. […] C’est la première fois que je ressens un truc pareil.

Avant qu’on m’incrimine pour perversion de la jeunesse, je tiens à préciser qu’il s’agit, officiellement, d’un dialogue tout ce qu’il a de plus sportif entre deux personnages de la série Kuroko no Basket, qu’il a lieu sur un terrain de basket et que les protagonistes portent des vêtements. Si vous n’avez rien relevé de spécial vous êtes doté d’une surprenante et perplexifiante candeur. Pour les personnes qui, comme moi, ont vu leur esprit s’échapper loin, loin, du terrain, félicitation, votre fujo-vision est active, consciente d’elle-même et dotée d’une volonté propre, à moins que vous ne fussiez un(e) irrémissible cochon(ne). On pourra objecter à ce diagnostic pas vraiment rassurant que le titre du chapitre: « Leave it to me » ou « Laisse-moi faire », dirigeait l’interprétation de l’entretien verbal dans une direction pentue et glissante ou encore que les muscles moites de nos joueurs de basketball, leurs souffles saccadés et rauques suite à l’effort et leurs échanges de regards équivoques avaient de quoi échauffer les esprits.

En réalité, la fujoshi est pleine de mauvaise foi mais à peine moins que tous ces mâles marinant dans leur déni. Le shônen est bourré d’amour et de testostérone, le shônen de sport est bourré d’amour, de testostérone et de fluides corporels tout comme le yaoi. Coïncidences ? Je ne crois pas.

I.H.

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