La voie sinueuse de l’auto-édition ou procédures et secrets d’un maître Zen.

Un rêve tu auras…

Bravo champion.ne !

Tu as eu un rêve et pas le plus rentable, ni le plus facile à réaliser : écrire un livre. Malgré les obstacles (aka la VIE) tu t’es fait un planning d’écriture et tu t’y es tenu.e. Tu t’es senti.e le roi/la reine du pétrole, tu as fait lire ton manuscrit à des gens de confiance et ils ont aimé (parce que c’est tes potes).

Puis tu as envoyé ton manuscrit à une maison d’édition qui ne t’as jamais répondu.e ou ils ont décidé de te publier mais n’ont jamais fait la moindre promo ou alors ça a marché pour toi, félicitations, je te hais. En tout cas, toi, tu t’es dit que le mieux, c’était de tout faire toi-même.

Ton destin en main tu prendras…

Mais c’était chaud… Relire, mettre en page, apprendre les normes de base de la typographie. Tu t’es dit : « tiret semi-cadratin ? », « belle page à droite mais sur le doc c’est à gauche ? », « comment ça se passe le copyright ? », « et si je le mettais en page sur Illustrator ? » mais t’es resté.e sur Word parce que ça fait le taf si tu maîtrises les sauts de sections (et que t’en avais ras le popotin de ton texte qui disparaissait).

Rambo se prépare à l'entraînement devant deux moines bouddhistes.
T’es un.e guerrier/ guerrière !

Tu t’es pas découragé.e, t’as pris l’adversité par les cojones, tel un Rambo du XXIème siècle et t’as grimpé l’escalier de l’adversité (ouais, c’est pas les mêmes films !). Tu as fait relire ton texte, vingt fois, à des gens qualifiés, mais t’inquiète pas, tu trouveras toujours une faute (et si t’es un.e champion.ne, elle sera dans les 10 premières pages ou sur la 4e de couverture, histoire que le lecteur te prenne bien pour un branquignole, mais un jour tu rétabliras ton honneur dans la seconde édition.)

Moult déboires et périls tu affronteras…

Puis tu commences à réfléchir à la couverture. Tu t’évalues vingt secondes : je suis une cacahuète en Photoshop ; Illustrator, j’ai donné ; je connais pas les logiciels ; un jour j’ai voulu dessiner un chaton et ça ressemblait à un plat de spaghetti bolognaise… L’étau se resserre : tu délègues. Tu cherches un.e illustrateur/illustratrice-graphiste dans ton budget, tu la/le rencontreras probablement en convention et tu seras super copine/copain avec elle/lui. Vous vous mettrez d’accord, puis y’aura des malentendus de plus ou moins grande ampleur. Si à ce stade là on t’a déjà prescrit du Xanax, c’est que t’es pas prêt pour la suite. N’aie crainte, le destin mettra finalement sur ta route l’Elu.e.

Porte en bois ornée de deux bouddhas.
Pense zen…

Pendant que ta/ton graphiste bosse sur la couverture, tu as fini ta mise en page. Elle est parfaite et tu commences à chercher un imprimeur pas cher. Tu te rends vite compte que c’est PixartPrinting et que ton nombre de pages internes doit être un multiple de 16 sinon l’équilibre de l’univers sera menacé et tu relâcheras une horde de démons pédophiles sur la Terre. Tu ouvres ton document et tu vérifies sur la calculette de ton ordi que ça passe, t’es un littéraire mais les divisions, tu gères. Et ça passe pas.

Batons d'encens.
Prends ton Xanax.

Anxiolytiques tu prendras…

Tu reprends un Xanax. Tu refais ta mise en page, tu supprimes des passages, tu changes les phrases pour les raccourcir. Et tu atteints le sacro-saint multiple de 16, le nombre d’or des imprimeurs. Et juste après, tu te rends compte que tu as oublié les remerciements, la page de titre et tu recommences tout avec toujours en tête « belle page à droite mais à gauche dans le doc », « tiret semi-cadratin ». Ça va plus vite, tu sens que tu as level up, tu te congratules et juste après, tu te maudits d’avoir écrit en calibri parce que ce n’est en aucun cas une police de livre et que ça t’as tout faussé tes calculs. Tu reprends un Xanax et tu re-check la mise en page.

Tu vas sur le site de l’AFNIL, tu demandes une série d’ISBN, tu choisis le premier pour ton livre, parce que t’avais zappé mais ta/ton graphiste est ton buddy et elle/il sait qu’il en faut un sur la couverture.

Compte sur ton buddy !

Anxiolytiques tu reprendras…

Un jour de printemps où les bourgeons ont éclos et la rosée du matin tout ça… tu as ton manuscrit, ta couverture au bon format et fébrilement, tu sors ta carte bleue, jettes une prière aux muses, flambes tes dernières économies et commande 100 exemplaires de ton livre. Tu patientes quelques jours, vois ta notification de livraison qui annonce l’arrivée de ton précieux vendredi soir. Et le livreur de DHL sonne chez toi le mercredi à 8h. Tu déballes tes cartons en pyjama. Tu as peur d’ouvrir ton livre, tu as l’angoisse irrationnelle de découvrir que les pages ont été imprimée à l’envers. Mais tu as pris ton Xanax et l’ouvres, tu feuillette et ça va, le texte est à l’endroit.

Tu es une rockstar !

Mais, jeune scarabée, ce n’est pas fini. Car tu veux le vendre ce livre et si possible en respectant les lois en vigueur de ce pays. Alors tu remplis en ligne ta déclaration de dépôt légal, tu sais, sur le site de la BnF (gloire à François Ier !) Et tu comprends que tu vas devoir leur envoyer un exemplaire de ton livre. T’imprimes ton étiquette (et t’es un chat noir, alors ta cartouche d’encre est vide à ce moment-là), tu achètes des enveloppes format livre (ne pleure pas, tu t’en serviras peut-être pour faire de la vente par correspondance même si les tarifs de la Poste sont une pure folie) et tu prépares ton enveloppe avec à la place de l’affranchissement : « Franchise Postale, Dépôt légal, Code du Patrimoine Article L132-1 », tu mets l’adresses de la BnF qui est sur ton étiquette et tu vas à la Poste.

Pense à ton safe space, tu es bien, c’est confortable…

Anxiolytiques et alcools tu mélangeras…

Souris!

A ce moment de la journée, si tu as déjà pris un Xanax, prends un fond de whisky, histoire d’être préparé pour ce qui va se passer. Tu vas être affable, mielleux, un vrai lèche-popotin et tu vas leur dire que ceci est un envoi à la Bibliothèque Nationale de France et qu’à ce titre tu es exonéré.e des frais postaux. On va te regarder comme un extra-terrestre, on va te dire que la Poste est une entreprise privée et qu’il faut payer car on peut pas aller à Carrefour et les obliger à faire quelque chose. Tu vas leur répondre que tu ne fais pas la loi et que sur le site de la BnF… On te coupera la parole pour te dire que c’était avant que la Poste ne soit privatisée et que maintenant ça ne se fait pas… Le whisky commencera à faire effet et tu ne te dégonfleras pas, tu leur diras de vérifier la note interne dite « chartée », nommée «Procédures de traitement des envois au titre du Dépôt Légal» référencée BSCC.PS.A.2016-009. Et tu demanderas à voir un supérieur et tu souriras.

Contrits et honteux, tes interlocuteurs prendront tes livres et tu leur demanderas un reçu, parce que moi je l’ai pas fait et s’ils me roulent dans la farine, j’aurais pas de preuves ! Allez, je vais prendre mon Xanax et on se voit en septembre !

Bon courage les darlings !
Un mignon petit avatar en chibi de moi par la divine Poncho ! Ne suis-je pas adorable en avatar ?
With love,
I.H.

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